le fleuve des brumes

Pas de soleil dans cette Italie là. Du froid, de la pluie, du givre et de la glace. Le long du Pô en crue, le commissaire Soneri enquête selon les uns, flâne selon les autres, parcourant les berges pour dénouer un double meurtre.

La brume envahit tout : le fleuve, les ports, les références au passé et l'esprit du commissaire. Cinquante ans après, les cicatrices de la guerre ne se sont pas refermées. Les anciens fascistes croisent sans les regarder les vieux communistes résistants. Au sein du Parti, tout du moins ce qu'il en reste, la vieille garde n'apprécie que peu la nouvelle génération, même si cette dernière se tatoue sur le bras la faucille et le marteau.

Cette brume, le rythme de la vie des bateliers qui fluctue selon les caprices du courant et de la météo emprisonne aussi le lecteur. La transition entre l'humidité pénétrante des rives et la chaleur des auberges où chacun retrouve un peu de réconfort au son des opéras en se délectant des spécialités culinaires de la région (ah qu'est-ce qu'on a envie de goûter à ce Culatello !) est parfaitement restituée.

Il y a du Maigret chez notre commissaire Soneri. Même si le cigare toscan remplace la pipe, même si l'instinct remplace la logique et même si sa compagne préfère s'envoyer en l'air dans des lieux incongrus plutôt que de tricoter au fond d'un appartement douillet. C'est sans doute sa manière de se mouvoir, de parler, de humer son environnement, de s'immiscer chez les petites gens, ceux que l'on ne voit pas, de savoir justement les écouter jusqu'à faire rejaillir leur passé.

Valerio Varesi nous offre une belle lecture, un roman qui se dévoile comme la décrue du Pô dévoile son histoire et ses villages engloutis.

Notice de l'éditeur

il Fiume delle nebbie

Dans une vallée brumeuse du nord de l’Italie, la pluie tombe sans relâche, gonflant le Pô qui menace de sortir de son lit. Alors que les habitants surveillent avec inquiétude la montée des eaux, une énorme barge libérée de ses amarres dérive vers l’aval avant de disparaître dans le brouillard. Quand elle s’échoue des heures plus tard, Tonna, son pilote aguerri,
est introuvable. Au même moment, le commissaire Soneri est appelé à l’hôpital de Parme pour enquêter sur l’apparent suicide d’un homme. Lorsqu’il découvre qu’il s’agit du frère du batelier disparu, et que tous deux ont servi ensemble dans la milice fasciste cinquante ans plus tôt, le détective est convaincu qu’il y a un lien entre leur passé trouble et les événements présents.
Mais Soneri se heurte au silence de ceux qui gagnent leur vie le long du fleuve et n’ont pas enterré les vieilles rancœurs. Les combats féroces entre chemises brunes et partisans à la fin de la guerre ont déchaîné des haines que le temps ne semble pas avoir apaisées, et tandis que les eaux baissent,
la rivière commence à révéler ses secrets : de sombres histoires de brutalité, d’amères rivalités et de vengeance vieilles d’un demi-siècle…