Le sabot du diable"(...) les surfeurs aimaient les histoires. Les grosses vagues et les hors-la-loi".

Le monde du surf est tout sauf cool. La compétition, vis à vis des autres et de soi-même est constante. Les passionnés n'y échappent jamais, quel que soit leur âge et les conséquences de leur passion, pour eux-même et pour ceux qui les entourent. Rien ne les arrêtent, ni une nature déchaînée, ni des populations hostiles.

La passion se nomme ici Heart Attacks, un spot terrible que peu ont vu, dont l'existence n'est rapportée que par quelques lignes publiées dans un livre dont la vérité est contestée. Il se situerait pas loin de Devil's Hoof, une baie au nord de la Californie. Sur cette côte, les légendes indiennes des tribus Tolowans et Hupas croisent celles de ces surfeurs qui ont connu leurs heures de gloire dans le passé.

Mais les rencontres, bien réelles, entre surfeurs et indiens sont violentes. Concilier désir de réussite pour les uns et désir de vengeance pour les autres est mission impossible. Dans ces contrées reculées, la police locale, réduite à sa plus simple expression, a bien du mal à maintenir un équilibre précaire. La loi s'avère souvent celle héritée des westerns, où le tireur le plus rapide à raison, surtout s'il est blanc.

Il y a un côté "Aguirre, la colère des dieux" dans Le sabot du diable. Les planches de surf remplacent les bateaux, les forêts de Californie la forêt amazonienne et La Vague la recherche de l'Eldorado. Et surtout, la folie s'insinue de plus en plus dans les têtes, sans exception. La nature s'exprime aussi, le plus souvent de manière hostile. Froid, brouillard, pluie, mer déchaînée et glacée, falaises abruptes et récifs semblent s'unir pour ralentir la progression des surfeurs. Sans oublier les requins.

Le sabot du diable est un roman policier à part. La recherche du coupable - initial - s'estompe mais reste en filigrane. Il faut dire que crimes, accidents et violences de toute sorte s'accumulent plus l'expédition avance.

Derrière le récit de cette nouvelle quête du Graal Kem NUNN montre une Amérique peu connue, à la frontière de la Californie et de l'Oregon, où se trouvent dans des réserves indiennes des peuples pris en étau entre leurs traditions ancestrales et le monde dit moderne, qui ne leur offre que peu de perspectives en dehors de petit boulots ou d'une oisiveté forcée, de la télévision, de la drogue et de l'alcool. Kem NUNN reste l'un des meilleurs auteurs pour décrire et analyser l'univers du surf, ses liens étroits, voire intimes, avec l'océan et ses rapports à l'argent (à lire aussi sur le thème du surf ses romans  Surf City et Tijuana Straits).

Le sabot du diable aurait aussi pu s'appeler Humaliwu, le nom d'une grande pointe s'élançant dans le Pacifique et signifiant en indien "l'endroit où meurent les légendes".

Notice de l'éditeur

Heart Attacks, c’est LA vague. Tous en rêvent. Très peu, dit-on, l’ont vue. Personne ne l’a surfée.
Quand un prestigieux magazine propose à Jack Fletcher de photographier Drew Harmon, une légende du surf, à Heart Attacks, il ne peut qu’accepter. Mais le spot est inaccessible, au fin fond d’une réserve indienne où règnent la violence, la drogue et les vieilles légendes tribales, dans un mystérieux endroit du nom de Devil’s Hoof, infesté de requins. Cette quête de la vague mythique va entraîner Fletcher et ses compagnons dans une aventure où la nature sauvage n’est pas le plus grand des dangers qu’ils devront affronter...